Laurence s’engage dans la création d’un habitat partagé senior et solidaire.
Laurence se définit comme la « locomotive d’un joli train » qui a pour destination Lamastre en Ardèche. En effet, depuis 2017, cette ergothérapeute de formation a décidé de s’engager dans la création d’un habitat partagé solidaire. En compagnie d’une douzaine d’autres membres de toutes générations, ils ont créé l’association « Encour’âge ». Ensemble, ils poursuivent le projet d’ouvrir cet habitat alternatif.
Cette grand-mère de 9 petits-enfants, nous partage, dans cet article, une partie de son projet de vie et différentes étapes de la création de ce logement collectif.
Je vous invite à découvrir, l’engagement de Laurence pour ce logement de qualité, basé sur les liens, la solidarité et où il fera bon vivre.
C’est parti !
Être créatif pour contrer une offre de lieux de vie limitée.
« 58 % des Européens privilégient la solution d’adapter le domicile pour y rester en sécurité en cas de perte de capacités physiques. » sources Odoxa.
Mais pour diverses raisons, ce choix n’est pas toujours envisageable. De plus en plus de seniors cherchent des solutions alternatives pour leur logement. Aujourd’hui, l’offre proposée par les maisons de retraite séduit de moins en moins les aînés et leurs familles. De plus, la crise sanitaire liée au coronavirus n’a pas aidé, les taux de remplissage de certaines structures n’ont jamais été aussi bas. De ce fait, certains réfléchissent à d’autres solutions et poussent la réflexion. Ils souhaitent vieillir dans des lieux plus en concordance avec leur projet de vie et leurs attentes.
Une des alternatives, l’habitat partagé pour les seniors.
Comme nous le savons, la vague grise est en marche. Certains pays comme les Pays-Bas, la Suède et l’Allemagne proposent depuis plus de 10 ans ces formes d’habitat. Dans nos contrées, fleurissent, depuis quelques années, divers projets d’habitats partagés repris sous des noms multiples et variés. Qu’il s’agisse d’habitat groupé, solidaire, partagé, regroupé, participatif, coopératif, béguinages, domiciles groupés…les fondations restent similaires. Ces projets proposent de petites structures de logements indépendants, couplés à des lieux de vie communs. Ces habitations sont basées sur le lien, tournées vers la Cité (leur emplacement est donc très important) et surtout liées à un projet collectif approuvé par les habitants. Nous sommes donc loin, ici, des appartements clé sur porte, couplés à des services comme peuvent le proposer certaines structures ou groupes. Les habitants sont acteurs du projet.
Laurence illustre avec l’exemple du projet dans lequel elle s’investit : « En 2016, je me suis retrouvée sans emploi. J’avais dans le cadre de ma profession, mené beaucoup de projets sur le logement, le retour à domicile. Je me suis dit à cette époque, qu’il était important de proposer, dans notre région, quelque chose d’autre que la maison de repos quand cela devenait trop compliqué de rester chez soi. Nous vivons dans une région rurale, de moyennes montagnes, où l’habitat est dispersé. De ce fait, le risque d’isolement est important. On a donc constitué un petit groupe de personnes intéressées, basé sur l’échange de compétences et la gouvernance partagée, pour inclure au plus vite les futurs habitants au projet. Pour que cette maison soit chez eux ».
Comme pour toute habitation, on commence par les plans et les fondations !
Après une étude de marché, en 2017, débute la recherche de financements. Fin 2018, un groupe de travail « Comment bien vieillir au pays » a été lancé. « Certaines personnes de ce groupe sont toujours avec nous. D’autres personnes ont affiné leur projet de vie et ont constaté que ce projet d’habitat groupé ne correspondait pas à leurs attentes. Nous les avons donc accompagnées dans leur projet de vie. Cela fait aussi partie de la démarche globale de notre association, aider à cette réflexion. »
Et même si la crise sanitaire a quelque peu perturbé les réunions, les participants ont quand même pu continuer quelques démarches. « Nous avons lancé des campagnes d’informations dans les médias, continué à travailler au projet social, et participé à un concours de projets innovants pour le financement. Nous avons trouvé des partenaires (Caritas Habitat et la fédération Soliha) financiers et surtout la maison ! »
Une bâtisse qui a une âme et remplie de bienveillance.
Et c’est dans une très jolie bâtisse en plein centre-ville que ce projet verra le jour. « Cette maison de +/- 400 m² dispose de 8 chambres qui seront mises à la location de personnes seules ou de couples. Les autres parties seront communes, le grand jardin, la salle à manger, les vérandas, la bibliothèque…Il y aura également une grande salle de réunion, où nous pourrons faire de la gym et des activités variées. La propriétaire nous laisse aussi un atelier avec un établi et des outils pour bricoler. Cette maison a toujours appartenu à des médecins.À l’origine au Docteur Elisée Charra, le fondateur de l’hôpital de Lamastre. C’est une maison qui a une âme et beaucoup de bienveillance. On pourra y faire tout ce que nous savons faire et aimons faire. Elle sera ouverte à toutes les personnes à la retraite ou en l’âge de l’être. » Mais, pas que…
Tout sauf un ghetto pour vieux !
Car c’est aussi sa situation qui a séduit tous les partenaires du projet. « L’ouverture sur la Cité, sa vie sociale et culturelle est très importante pour nous. Certaines personnes habitent déjà Lamastre, d’autres vont déménager pour y résider. Pouvoir participer au club des anciens, se rendre au cinéma et surtout dans notre région être à deux pas du terrain de jeu de boules, c’était essentiel ! »
La maison sera également ouverte : « Il y a plein de petits coins qui permettront aux familles de se retrouver. Nous avons aussi prévu une chambre pour les invités. L’une des habitantes reçoit régulièrement ses petites-filles pendant les vacances, elle pourra continuer à les accueillir. »
Des « facilitateurs de vie » seront également embauchés : « Ces personnes seront considérées comme des invités dans la maison. Ils y passeront quelques heures par jour pour aider quand c’est nécessaire, mettre un peu d’huile dans les engrenages. »
Un pont est aussi envisagé entre la maison et l’entreprise de travail adapté de la région : « Certains travailleurs bénéficient d’appartements supervisés. À un certain âge, cette solution n’est plus toujours possible, ils pourraient nous rejoindre à la maison. »
Avant de nous quitter, je félicite Laurence pour ce projet. Je suis persuadée que les colocations seniors représentent une des pistes de solutions aux défis du logement auxquels nous serons confrontés dans quelques années. Il est évident que ce ne sera pas la seule, mais il est primordial d’y penser, dès aujourd’hui, et de mettre en place des politiques qui favoriseront des logements de qualité pour demain.
Cependant, elle me précise : « Si je n’avais pas une équipe, je n’y serais jamais arrivée. Il y a beaucoup de travail administratif, d’incohérence à gérer. Nous avons aussi reçu le soutien de nombreux élus départementaux et du réseau HAPA (Habitat partagés accompagnés). Ce projet fait sens, c’est cela qui nous encourage à continuer. Nous voulons permettre aux habitants d’habiter une maison où ils resteront libres et où l’humain sera au centre du projet ».
Merci Laurence pour ce moment partagé.
Nous nous retrouverons la semaine prochaine en compagnie d’une mamie blogueuse !
Et vous, où aimeriez-vous vieillir ?
J’attends vos réponses dans la rubrique commentaires 😉
Coralie
Pour aller plus loin, en Belgique : Habitat groupé.
Coucou Coralie,
Merci beaucoup pour ton article qui m’a immédiatement séduite !
Depuis une dizaine d’année je pense à une telle réalisation… Je vis en pleine campagne et cependant dans un village très vivant où il ne manque rien, boutique ou surface commerciale. Même le corps médial et les pharmacies ne manquent pas ! Ni les activités culturelles ….
Ici pour se déplacer d’un endroit à un autre, le vélo, la marche sont suffisants …
Le problème c’est de trouver des personnes intéressées par ce genre de vie et de partir de zéro :
c’est-à-dire achat terrain et construction immeuble, si possible de plein pied pour une dizaine de personnes, maximum 12. Couples et célibataires…. à partir de + ou – 65 / 70 ans ?
Tout le reste de ton reportage serait identique….
Les fonds seraient ceux des personnes intéressées en investissant à partir de leur bien actuel.
ON PEUT REVER , car je pense cela irréalisable et ce projet prendrait beaucoup trop de temps ! SAUF si des amateurs éventuels…. Je ne suis plus si loin de 4 x 20 !!
Moi, j’ai bien l’idée et la bonne volonté mais cela ne sera pas suffisant non plus !!
Une résidence-service, dépendant du CPAS, tout nouvel immeuble à étages, vient de voir le jour et peine à se remplir; c’est pourquoi je penche pour du plein pied.
Cela ne se fera pas sur quelques années; puisque rien encore n’est en proposition aujourd’hui…
Et pour la réalisation finale, la prise en possession de nos « biens » à mon avis, beaucoup d’eau sera passée sous les ponts du « Val de l’Escaut » !!
Je reprend donc ma petite phrase …: « On peut rêver » ….
Bien à toi, bisous.
Nicole.
Bonjour Nicole,
Merci pour ton commentaire. Effectivement, il est essentiel de s’entourer de partenaires et de spécialistes en amont pour ce type de projet. Les habitats groupés dépendent de nombreuses législations.
Trop souvent, j’ai observé des personnes qui pour de multiples raisons vivaient dans un logement inadapté. Cette question du logement doit être envisagée assez tôt, pour pouvoir continuer à vivre dans un logement et environnement de qualité qui correspondent à nos attentes. La réalisation est longue, certes, mais l’expérience des autres peut aussi aider. A bientôt !
Cet article me touche beaucoup et je trouve l‘initiatrice bien inspirée et courageuse. Cela me donne envie d‘en savoir plus. Avec un groupe d‘amies, nous avons déjà abordé cette éventualité mais plus en regroupement de femmes et avec des logements complets pour vivre en autonomie mais à proximité les unes des autres. Cela paraît utopique mais séduisant en tout cas. Merci pour ce partage Coralie.
Bonjour Marie, avec plaisir,
Ce type de projet qui regroupe des femmes existe également en France.
Il s’appelle les « Babayagas » et a été fondé en 2012. Si tu souhaites compléter tes recherches 😉
Belle journée.
Coralie
Parfait, merci pour ce partage.
Avec plaisir !